mercredi 26 juin 2002
Conférence annuelle 2002 de la World Aquaculture Society, Beijing
Tahitian grafter l
mercredi 26 juin 2002 - 15:19
Catégorie : Perliculture dans le Monde
Wayne O’Connor
NSW Fisheries, Port Stephens Fisheries Centre, Taylors Beach, NSW, Australie.
Les conférences annuelles de la World Aquaculture Society comptent parmi les rares occasions qu'ont les professionnels de la perliculture du monde entier de se rencontrer et d'examiner les grandes tendances et les faits marquants qui se dégagent des activités du secteur perlicole. Cette année, la conférence s'est tenue à Beijing (Chine). Comme lors des précédentes éditions, elle a attiré des participants d'horizons très divers venus de nombreuses régions du monde.
Conformément à la pratique instituée en 1994, une séance de travail a été consacrée à la perliculture. Elle était présidée conjointement par Richard Fassler, du département des Entreprises, du Développement économique et du Tourisme de l'État d'Hawaii (États-Unis), et Yu Xiangyong, de l'Université d'océanographie de Zhanjiang (Chine). Des exposés et des affiches consacrés à des thèmes divers ont été présentés. La question a suscité un tel intérêt qu'il a fallu inscrire certains débats au programme d'autres séances de travail portant sur des sujets connexes. Plusieurs grands thèmes ont été abordés, mais les questions relatives au recul des ventes, en particulier de perles noires, et aux mesures à prendre pour améliorer la qualité des perles ont largement dominé les débats. Les étudiants présents ont manifesté un intérêt considérable pour la perliculture et il convient à cet égard de féliciter Anne-Michelle Lee et Josiah Pit, de l'Université James Cook, qui ont obtenu le prix des étudiants de la World Aquaculture Society pour la qualité de leurs travaux. On ne peut que se réjouir de voir de jeunes talents consacrer leurs compétences à l'étude de la perliculture.
Chine
Plusieurs participants ont présenté des informations sur la perliculture chinoise. Yu Xiang-Yong a fait un bref historique de la perliculture d'eau de mer en Chine, décrit certains des problèmes rencontrés et fait le point sur les travaux de recherche en cours dans le pays. Le lancement de la perliculture en milieu marin fait suite aux travaux menés à Zhanjiang (Chine méridionale) par le professeur Dalen Xiong, qui a fait oeuvre de pionnier en ce domaine. Les premières perles de culture rondes ont été produites en 1958. Durant les années qui suivirent, le secteur perlicole n'a cessé de se développer et la production a atteint 25 à 30 tonnes par an. En dépit de ses performances, l'industrie perlière chinoise est confrontée à des problèmes de grande ampleur. Les stocks naturels ont été surexploités et les perliculteurs ne se sont guère souciés de maintenir la diversité génétique des populations d'élevage. La qualité des eaux se dégrade, les fermes sont surpeuplées et on y enregistre de forts taux de mortalité. En outre, les taux de rejet des nucléi sont élevés, les rendements faibles et les perles généralement de qualité médiocre.
Selon Yu Xiang-Yong, la solution à ces problèmes passe par un plus large engagement des pouvoirs publics en faveur des activités de recherche, de surveillance de la pollution, de réglementation et d'éducation des perliculteurs. Des recherches sont en cours, dont plusieurs études visant à évaluer la diversité génétique et le potentiel d'hybridation des huîtres akoya (Pinctada martensii) à l'aide de techniques d'amplification aléatoire d'ADN polymorphe et de mesures isozymiques et morphologiques. D'autres travaux ont mis en évidence les avantages que présente la triploïdie chez P. martensii; elle favorise notamment la croissance accélérée des huîtres, et des essais de production de tétraploïdes ont été réalisés en vue de la production de triploïdes. Les chercheurs tentent par ailleurs de diversifier les espèces d'élevage et de promouvoir l'utilisation d'autres Ptéridés comme les huîtres perlières à lèvres dorées (P. maxima), à lèvres noires (P. margaritifera) et à ailes noires (Pteria penguin), que l'on trouve à l'état sauvage dans les eaux chinoises.
Le professeur Yu Xiang-Yong est revenu sur les progrès réalisés dans la culture des moules d'eau douce Cristaria plicata utilisées pour la production de perles issues de nucléi constitués d'une perle. Selon les informations disponibles, la technique serait la même que celle utilisée pour le greffage des espèces marines d'huîtres perlières. Un seul nucléus, dont le diamètre est généralement compris entre 7 et 9 mm, est implanté dans la moule avec un fragment de manteau. La perle est ensuite cultivée pendant un à deux ans. La production de perles d'eau douce selon cette méthode est en hausse et a légèrement dépassé les quatre tonnes en 2001. Dans son intervention, Hua Dan est revenu en détail sur l'évolution récente de l'industrie perlicole chinoise. Il a notamment mentionné l'utilisation grandissante d'une nouvelle espèce de moule, Hyriopsis cumingii et décrit les techniques utilisées pour produire des perles à partir d'un nucléus constitué exclusivement d'un fragment de manteau. Il a par ailleurs souligné que la Chine dominait désormais le marché de la perle d'eau douce, avec une production annuelle de l'ordre de 800 à 1000 tonnes, dont 400 à 500 tonnes sont exportées vers l'Asie, l'Europe, l'Afrique et les États-Unis.
Comme l'a rappelé le professeur Yu Xiang-Yong, des efforts considérables ont été faits pour améliorer les taux de croissance de P. martensii. Le professeur Aimin Wang, ancien membre de l'Institut d'océanographie de Guangxi, et actuellement en poste à l'Université d'océanographie de Hainan, a décrit les diverses tentatives faites en ce sens. Toutes visent la production d'huîtres tétraploïdes susceptibles de produire des triploïdes que l'on pourra fournir aux perliculteurs. Le professeur Wang a cité les trois techniques suivantes : 1) inhibition de l'émission du premier globule polaire libéré par les ovules triploïdes fécondés; 2) inhibition de l'émission des premier et deuxième globules polaires libérés par les ovules diploïdes; et 3) inhibition de la première division des zygotes diploïdes. Chacune de ces méthodes permet de produire des trocophores tétraploïdes. Toutefois, le taux de survie des larves ainsi obtenues est faible, quel que soit le procédé utilisé. Lors de ces essais, seule l'inhibition des deux corps polaires a abouti à la formation de juvéniles tétraploïdes, bien que le pourcentage d'huîtres tétraploïdes soit très faible (0,0625 %). Le professeur Wang a également fait état de ses travaux de recherche sur la sélection des huîtres à l'aide de microsatellites aux fins de l'accélération de la croissance des individus d'élevage et des efforts qu'il mène pour réintroduire la culture de P. maxima sur l'île de Hainan (Chine méridionale).
Perles noires
Richard Fassler est revenu sur la multiplication des fermes perlicoles dans le Pacifique, soulignant les avantages qui pourraient en découler pour nombre de pays insulaires océaniens. Il a cependant fait remarquer que la Polynésie française occupe une position prépondérante dans le secteur et pourrait à terme dominer le marché régional. La production de perles de Tahiti a augmenté rapidement, dépassant les objectifs visés par les campagnes de promotion, et les prix des perles noires ont accusé une forte baisse. Selon certaines informations encore non confirmées, des licenciements massifs auraient été opérés dans l'industrie perlière polynésienne.
Richard Fassler a souligné que la baisse du prix des perles de Tahiti influerait incontestablement sur les prix pratiqués par les autres producteurs. Pour éviter d'en arriver là, il faut faire en sorte que les perles de Tahiti se distinguent clairement des autres produits. L'objectif doit être de produire des perles exceptionnelles, en sélectionnant par exemple des couleurs ou des formes très originales, tout en privilégiant la qualité, qui doit l'emporter en toutes circonstances sur les considérations quantitatives. Selon M. Fassler, certains lagons de Polynésie française sont déjà surexploités, ce qui devrait inciter les producteurs qui se lancent dans la perliculture à la plus grande prudence. Sans pour autant conclure à la fin annoncée de la perliculture, M. Fassler a montré dans son intervention que le secteur perlicole allait probablement subir de profonds changements structurels dans les années à venir.
Bernard Poirine a apporté des précisions sur la crise que traverse actuellement l'industrie perlière polynésienne et a présenté un historique de la production et de l'évolution des prix des perles noires de Tahiti. La surexploitation des lagons de Polynésie française est au coeur des difficultés rencontrées actuellement. En 1972, la Polynésie française produisait 1,5 kg de perles par an. Depuis, la production a augmenté à raison de 29 pour cent par an et a atteint 11 764 kg en 2000. Cette progression s'est accompagnée d'une chute des prix et la production s'oriente à présent à la baisse. Certains indicateurs comme ceux relatifs aux importations de nucléi incitent à penser que le recul de la production devrait durer. Selon M. Poirine, la crise de la perliculture polynésienne est un exemple de plus des conséquences dramatiques de l'exploitation inconsidérée de ressources naturelles communes.
M Poirine a présenté des modèles théoriques de production perlicole qui ont mis en évidence le décalage entre les conditions économiques et les facteurs biologiques les plus favorables à la production des perles. Il a notamment souligné qu'au plan économique, les conditions optimales de production sont réunies à des densités de peuplement très largement inférieures à la densité maximale soutenable. Il a également examiné les avantages respectifs des divers cadres réglementaires mis en place pour tenter de résoudre les problèmes liés à la surexploitation et cité les systèmes de quotas en vigueur en Australie et les mécanismes de gestion en coopération des ressources halieutiques instaurés au Japon. L'exposé de Bernard Poirine a été suivi d'un débat auquel ont pris part Terii Seaman et Ben Ponia. En Polynésie française, on a constitué un groupe de travail chargé d'examiner les questions intéressant le contrôle des exportations, les restrictions à l'octroi de concessions perlicoles, l'application de normes minimales de qualité et la réglementation des densités de peuplement d'huîtres.
La culture des huîtres perlières, et en particulier de P. margaritifera, suscite un intérêt grandissant. Dans son intervention, Ajai Sonkar a fait référence au potentiel de développement de la culture de cette espèce dans les îles Andaman et Nicobar. Ces deux archipels, situés dans la zone économique exclusive de l'Inde, abritent plusieurs sites adaptés à la culture de P. margaritifera. Toutefois, les stocks naturels de P. margaritifera sont peu abondants localement et il faudra peut-être envisager de produire des huîtres en écloserie.
Les chercheurs de l'Université James Cook, dans le Queensland (Australie), ont examiné divers aspects de la production d'huîtres afin d'améliorer les techniques utilisées pour la culture de P. margaritifera. Josiah Pit a évalué plusieurs espèces d'algues tropicales pour déterminer dans quelle mesure elles pourraient se substituer aux espèces originaires de régions plus tempérées qui constituent généralement le régime alimentaire de P. margaritifera. Il a notamment constaté que l'introduction de Pavlova salina dans l'alimentation des larves leur était bénéfique. Hector Acosta-Salmon a présenté une technique non destructrice de prélèvement de tissu gonadique chez P. margaritifera qui consiste, après injection de phénoxetol de propylène, substances aux propriétés relaxantes, à insérer dans la coquille de l'huître une aiguille de biopsie munie d'une encoche de 10 mm afin de retirer des gamètes de la surface antéro-dorsale de la gonade. Les échantillons ainsi prélevés servent à l'étude des conditions de reproduction des huîtres.
Culture de Pinctada maxima en Irian Jaya
Dans le passé, les informations sur les travaux de recherche et développement menés sur P. maxima dans les fermes perlicoles étaient rares. L'année 2001 et les prochaines réunions sur l'huître perlière devraient en revanche donner lieu à une avalanche d'informations sur cette question. Joseph Taylor, Jens Knauer et Anne- Michelle Lee, de la société Atlas Pacific Pty Ltd, basée à Perth (Australie occidentale), ont présenté plusieurs exposés et une affiche sur les activités entreprises pour améliorer la qualité des perles des mers du Sud produites en Irian Jaya. Joseph Taylor a indiqué qu'en Australie, des perles de couleur dorée s'étaient récemment vendues à des prix nettement supérieurs à ceux des perles argentées. Les intervenants ont ensuite discuté de l'intérêt des tentatives visant à accroître le pourcentage de perles de cette couleur. Joseph Taylor a précisé que la proportion de perles dorées récoltées en Indonésie est supérieure à celle enregistrée en Australie et qu'après sélection de donneurs de saibo (manteau) doré, on obtenait une augmentation de 8,6 pour cent du nombre de perles dorées. Toutefois, il a émis des réserves sur l'efficacité de cette méthode, la proportion de perles de couleur jaune crème demeurant par ailleurs très élevée (78,8%). À l'inverse, en utilisant du saibo argent nacré, on obtiendrait selon les informations disponibles plus de 98 pour cent de perles blanc argenté, dont un grand nombre dans les catégories des perles rondes, des poires et des boutons, qui sont les plus appréciées.
Dans le passé, la pénurie de donneurs a été l'un des principaux obstacles à l'utilisation de saibo argenté en Indonésie. Jens Knauer a indiqué à ce propos que le pourcentage d'huîtres à nacre argentée est compris dans certains sites entre 0,3% et 8,9% et a passé en revue les diverses stratégies utilisées pour accroître les réserves de donneurs de saibo présentant les caractéristiques requises. Dans un premier temps, on a produit des larves à partir de reproducteurs choisis pour leur nacre argentée, qui ont ensuite été rejoints par des huîtres à nacre argentée sélectionnées après suivi parmi des individus âgés de 20 à 24 mois issus de cycle de production classiques. Il est intéressant de noter à cet égard que Taylor et Knauer ont tous deux relevé des différences de croissance entre les huîtres à nacre argentée et les huîtres à nacre dorée, ces dernières grossissant plus vite.
Taylor et Knauer ont ensuite fait état des activités visant à accroître le rendement des opérations perlicoles. L'objectif est de conditionner les huîtres avant greffage et d'élaborer des méthodes permettant de mieux cerner les facteurs qui doivent entrer dans la sélection des nucléi. On a comparé les conditions opératoires, les taux de survie postopératoire et les taux de rétention des nucléi relevés chez des huîtres placées sur le fond et d'autres suspendues dans des sacs à mailles de 1 mm ou dans des sacs de riz. C'est parmi les huîtres cultivées sur le fond qu'on a enregistré le plus fort pourcentage d'individus opérables. Par contre, les taux de survie et de rétention des nucléi sont plus élevés chez les huîtres suspendues dans des sacs à mailles. En ce qui concerne la sélection des nucléi, Knauer a fait remarquer qu'à des prix compris entre 88 et 165 dollars australiens le kilo, les nucléi constituent un poste de dépenses particulièrement lourd et absorbent des ressources qui pourraient être consacrées au développement des exploitations perlicoles. Dans le passé, les achats de nucléi s'effectuaient sur la base de prévisions empiriques qui se révélaient généralement justes à 60%. Des études sur le lien entre les caractères morphologiques de P. maxima (poids humide, poids de la coquille, largeur et longueur) et la taille des nucléi à implanter ont été entreprises. Selon Knauer, le poids humide des huîtres est le meilleur indicateur de la taille du nucléus à sélectionner. En outre, la prise en compte d'un seul trait morphologique porte bien au-delà des 60 % le degré de précision des prévisions relatives à la taille optimale des nucléi.
Atlas Pacific poursuit son programme d'évaluation des sites perlicoles et des profondeurs de suspension des huîtres afin de recueillir des données sur les taux de croissance des huîtres perlières par classe de taille. Anne-Michelle Lee a effectué le suivi de divers paramètres environnementaux qu'elle a corrélés aux taux de croissance des huîtres. Si la profondeur ne semble pas constituer un facteur de croissance important, on commence à avoir une idée plus précise de l'influence sur la croissance des huîtres des facteurs d'ordre spatial et saisonnier.
Culture des akoyas en Australie
Les succès enregistrés ces 15 dernières années dans le secteur perlicole ont incité de nouveaux candidats à se lancer dans la perliculture. Cette année, plusieurs réunions ont été consacrées aux recherches axées sur la production de perles akoyas dans le Queensland et en Nouvelle-Galles du Sud. Josiah Pit a présenté les résultats de deux programmes de recherche expérimentale sur les taux de croissance de P. imbricata : celui qu'il dirige à la station de recherche de l'Université James Cook sur l'île d'Orpheus et celui que je mène au centre de recherche halieutique du service des pêches de la Nouvelle-Galles du Sud, à Port Stephens. Les taux de croissance des larves relevés sur les deux sites d'étude sont identiques (à environ 20 jours de la fixation), mais la croissance des huîtres en écloserie et en bassins de grossissement est plus rapide dans les eaux plus chaudes du Queensland. Exception faite de ces quelques différences, on peut obtenir en douze mois, dans le Queensland comme en Nouvelle-Galles du Sud, des individus de 50 mm, voire plus.
En dépit des forts taux de croissance relevés dans le Queensland, on a observé la présence d'individus à croissance lente dans les lots de P. imbricata produits. Or, on peut s'interroger sur l'intérêt qu'il y a à poursuivre l'élevage de ces "avortons". En réponse à cette question, Josiah Pit a fait état d'expériences dans lesquelles les avortons ont été séparés de leurs congénères et leurs taux de croissance individuels comparés à ceux des individus de plus grande taille. On a ainsi constaté que les avortons se mettaient alors à grossir dans les mêmes proportions que les autres huîtres, ce qui semble indiquer que les faibles taux de croissance enregistrés lors des tout premiers stades de leur développement étaient dus à des facteurs environnementaux et non génétiques.
Parallèlement aux études que nous menions sur le potentiel de développement de la culture de P. imbricata en Nouvelle-Galles du Sud, nous avons commencé à nous intéresser aux conditions de reproduction de l'espèce. Nos travaux ont montré que l'activité reproductrice de P. imbricata est plus importante de la fin du printemps au début de l'automne et faible durant l'hiver. On distingue deux périodes d'intense activité reproductrice : en novembre et en mars-avril. L'examen des gonades au microscope fait cependant apparaître certaines différences entre ces deux périodes de reproduction. En effet, une grande partie des gonades prélevées en novembre étaient vides, ce qui semble logique compte tenu de la période de ponte, tandis que l'examen des échantillons recueillis en avril-mai tendaient à indiquer que les gonades étaient en phase de résorption. Le nombre de naissains fixés a considérablement varié d'une année à l'autre, mais la fixation des larves s'effectue exclusivement durant les mois d'été (de décembre à février). Ce constat cadre bien avec la ponte du mois de novembre et incite par ailleurs à penser que la période automnale de forte activité reproductrice est sans incidence sur la fixation des huîtres.
Si à ce jour les prédateurs ne constituent pas un problème majeur pour la culture de P. imbricata en Nouvelle- Galles du Sud, la présence du ver plat Imogine mcgrathi, dans des cages et des sacs à naissains est malgré tout préoccupante. Ce ver se nourrit d'huîtres perlières à raison d'un individu par mois environ et infeste en grands nombres, bien que de manière sporadique, d'autres élevages de mollusques de Nouvelle-Galles du Sud, notamment les fermes ostréicoles et mytilicoles. On a donc évalué l'efficacité de différents protocoles de lutte contre ce prédateur pour le cas où il viendrait à coloniser massivement les élevages d'huîtres perlières. Un moyen efficace de lutte contre le ver plat consiste à plonger les huîtres dans du sel ou dans un bain à faible ou à forte concentration de sel. À l'heure actuelle, les huîtres élevées en cage sont plongées dans de l'eau douce pendant 30 minutes, ce qui suffit à tuer les vers. De manière générale, il faut veiller à ce que la salinité de l'eau ne soit pas supérieure à 2,5 ppm.
Mexique : le secteur perlicole en plein développement
Durant les débats, Richard Fassler a exprimé à plusieurs reprises son admiration pour les travaux menés au Mexique dans le domaine perlicole. C'est donc avec grand intérêt que nous avons pris connaissance des informations que Carlos Rangel-Davalos et plusieurs de ses collègues nous ont présentées à ce sujet à l'occasion de la réunion. L'industrie perlière mexicaine repose principalement sur la culture de Pteria sterna et de Pinctada mazatlanica, qui peuvent être produites en écloserie. Carlos Rangel-Davalos a décrit la méthode de culture qu'il a expérimentée dans le cadre de ses recherches. Elle consiste à placer les huîtres dans des cages en plastique à mailles de 3,6 x 3,6 m. Lorsqu'elles atteignent 70 mm, elles peuvent être greffées et sont ensuite placées dans des filets kangourou "repliés", fixés sur un cadre en fer posé sur le fond. L'entretien de ce système suppose la présence de trois techniciens pendant 90 jours pour chaque lot de 10 000 individus. Trois ans s'écoulent entre la formation des naissains et la récolte des perles.
Outre leurs recherches sur la perliculture, Carlos Rangel- Davalos et ses collègues ont également mentionné les activités de repeuplement des bancs d'huîtres naturels avec des juvéniles nés en écloserie. Dans le passé, les bancs d'huîtres du Mexique ont fait l'objet d'une exploitation intensive, au point qu'il a fallu interdire la pêche des huîtres. Les intervenants ont également présenté une affiche sur le repeuplement réussi d'une colonie d'huîtres de l'île de La Gaviota, dans la baie de La Paz. L'utilisation de parcs d'élevage grillagés destinés à protéger les huîtres jusqu'à ce qu'elles atteignent 98 mm est au coeur du succès de ce projet. Au bout de 11 mois, on enregistrait des taux de survie compris entre 8,3 et 21,2%.
NSW Fisheries, Port Stephens Fisheries Centre, Taylors Beach, NSW, Australie.
Les conférences annuelles de la World Aquaculture Society comptent parmi les rares occasions qu'ont les professionnels de la perliculture du monde entier de se rencontrer et d'examiner les grandes tendances et les faits marquants qui se dégagent des activités du secteur perlicole. Cette année, la conférence s'est tenue à Beijing (Chine). Comme lors des précédentes éditions, elle a attiré des participants d'horizons très divers venus de nombreuses régions du monde.
Conformément à la pratique instituée en 1994, une séance de travail a été consacrée à la perliculture. Elle était présidée conjointement par Richard Fassler, du département des Entreprises, du Développement économique et du Tourisme de l'État d'Hawaii (États-Unis), et Yu Xiangyong, de l'Université d'océanographie de Zhanjiang (Chine). Des exposés et des affiches consacrés à des thèmes divers ont été présentés. La question a suscité un tel intérêt qu'il a fallu inscrire certains débats au programme d'autres séances de travail portant sur des sujets connexes. Plusieurs grands thèmes ont été abordés, mais les questions relatives au recul des ventes, en particulier de perles noires, et aux mesures à prendre pour améliorer la qualité des perles ont largement dominé les débats. Les étudiants présents ont manifesté un intérêt considérable pour la perliculture et il convient à cet égard de féliciter Anne-Michelle Lee et Josiah Pit, de l'Université James Cook, qui ont obtenu le prix des étudiants de la World Aquaculture Society pour la qualité de leurs travaux. On ne peut que se réjouir de voir de jeunes talents consacrer leurs compétences à l'étude de la perliculture.
Chine
Plusieurs participants ont présenté des informations sur la perliculture chinoise. Yu Xiang-Yong a fait un bref historique de la perliculture d'eau de mer en Chine, décrit certains des problèmes rencontrés et fait le point sur les travaux de recherche en cours dans le pays. Le lancement de la perliculture en milieu marin fait suite aux travaux menés à Zhanjiang (Chine méridionale) par le professeur Dalen Xiong, qui a fait oeuvre de pionnier en ce domaine. Les premières perles de culture rondes ont été produites en 1958. Durant les années qui suivirent, le secteur perlicole n'a cessé de se développer et la production a atteint 25 à 30 tonnes par an. En dépit de ses performances, l'industrie perlière chinoise est confrontée à des problèmes de grande ampleur. Les stocks naturels ont été surexploités et les perliculteurs ne se sont guère souciés de maintenir la diversité génétique des populations d'élevage. La qualité des eaux se dégrade, les fermes sont surpeuplées et on y enregistre de forts taux de mortalité. En outre, les taux de rejet des nucléi sont élevés, les rendements faibles et les perles généralement de qualité médiocre.
Selon Yu Xiang-Yong, la solution à ces problèmes passe par un plus large engagement des pouvoirs publics en faveur des activités de recherche, de surveillance de la pollution, de réglementation et d'éducation des perliculteurs. Des recherches sont en cours, dont plusieurs études visant à évaluer la diversité génétique et le potentiel d'hybridation des huîtres akoya (Pinctada martensii) à l'aide de techniques d'amplification aléatoire d'ADN polymorphe et de mesures isozymiques et morphologiques. D'autres travaux ont mis en évidence les avantages que présente la triploïdie chez P. martensii; elle favorise notamment la croissance accélérée des huîtres, et des essais de production de tétraploïdes ont été réalisés en vue de la production de triploïdes. Les chercheurs tentent par ailleurs de diversifier les espèces d'élevage et de promouvoir l'utilisation d'autres Ptéridés comme les huîtres perlières à lèvres dorées (P. maxima), à lèvres noires (P. margaritifera) et à ailes noires (Pteria penguin), que l'on trouve à l'état sauvage dans les eaux chinoises.
Le professeur Yu Xiang-Yong est revenu sur les progrès réalisés dans la culture des moules d'eau douce Cristaria plicata utilisées pour la production de perles issues de nucléi constitués d'une perle. Selon les informations disponibles, la technique serait la même que celle utilisée pour le greffage des espèces marines d'huîtres perlières. Un seul nucléus, dont le diamètre est généralement compris entre 7 et 9 mm, est implanté dans la moule avec un fragment de manteau. La perle est ensuite cultivée pendant un à deux ans. La production de perles d'eau douce selon cette méthode est en hausse et a légèrement dépassé les quatre tonnes en 2001. Dans son intervention, Hua Dan est revenu en détail sur l'évolution récente de l'industrie perlicole chinoise. Il a notamment mentionné l'utilisation grandissante d'une nouvelle espèce de moule, Hyriopsis cumingii et décrit les techniques utilisées pour produire des perles à partir d'un nucléus constitué exclusivement d'un fragment de manteau. Il a par ailleurs souligné que la Chine dominait désormais le marché de la perle d'eau douce, avec une production annuelle de l'ordre de 800 à 1000 tonnes, dont 400 à 500 tonnes sont exportées vers l'Asie, l'Europe, l'Afrique et les États-Unis.
Comme l'a rappelé le professeur Yu Xiang-Yong, des efforts considérables ont été faits pour améliorer les taux de croissance de P. martensii. Le professeur Aimin Wang, ancien membre de l'Institut d'océanographie de Guangxi, et actuellement en poste à l'Université d'océanographie de Hainan, a décrit les diverses tentatives faites en ce sens. Toutes visent la production d'huîtres tétraploïdes susceptibles de produire des triploïdes que l'on pourra fournir aux perliculteurs. Le professeur Wang a cité les trois techniques suivantes : 1) inhibition de l'émission du premier globule polaire libéré par les ovules triploïdes fécondés; 2) inhibition de l'émission des premier et deuxième globules polaires libérés par les ovules diploïdes; et 3) inhibition de la première division des zygotes diploïdes. Chacune de ces méthodes permet de produire des trocophores tétraploïdes. Toutefois, le taux de survie des larves ainsi obtenues est faible, quel que soit le procédé utilisé. Lors de ces essais, seule l'inhibition des deux corps polaires a abouti à la formation de juvéniles tétraploïdes, bien que le pourcentage d'huîtres tétraploïdes soit très faible (0,0625 %). Le professeur Wang a également fait état de ses travaux de recherche sur la sélection des huîtres à l'aide de microsatellites aux fins de l'accélération de la croissance des individus d'élevage et des efforts qu'il mène pour réintroduire la culture de P. maxima sur l'île de Hainan (Chine méridionale).
Perles noires
Richard Fassler est revenu sur la multiplication des fermes perlicoles dans le Pacifique, soulignant les avantages qui pourraient en découler pour nombre de pays insulaires océaniens. Il a cependant fait remarquer que la Polynésie française occupe une position prépondérante dans le secteur et pourrait à terme dominer le marché régional. La production de perles de Tahiti a augmenté rapidement, dépassant les objectifs visés par les campagnes de promotion, et les prix des perles noires ont accusé une forte baisse. Selon certaines informations encore non confirmées, des licenciements massifs auraient été opérés dans l'industrie perlière polynésienne.
Richard Fassler a souligné que la baisse du prix des perles de Tahiti influerait incontestablement sur les prix pratiqués par les autres producteurs. Pour éviter d'en arriver là, il faut faire en sorte que les perles de Tahiti se distinguent clairement des autres produits. L'objectif doit être de produire des perles exceptionnelles, en sélectionnant par exemple des couleurs ou des formes très originales, tout en privilégiant la qualité, qui doit l'emporter en toutes circonstances sur les considérations quantitatives. Selon M. Fassler, certains lagons de Polynésie française sont déjà surexploités, ce qui devrait inciter les producteurs qui se lancent dans la perliculture à la plus grande prudence. Sans pour autant conclure à la fin annoncée de la perliculture, M. Fassler a montré dans son intervention que le secteur perlicole allait probablement subir de profonds changements structurels dans les années à venir.
Bernard Poirine a apporté des précisions sur la crise que traverse actuellement l'industrie perlière polynésienne et a présenté un historique de la production et de l'évolution des prix des perles noires de Tahiti. La surexploitation des lagons de Polynésie française est au coeur des difficultés rencontrées actuellement. En 1972, la Polynésie française produisait 1,5 kg de perles par an. Depuis, la production a augmenté à raison de 29 pour cent par an et a atteint 11 764 kg en 2000. Cette progression s'est accompagnée d'une chute des prix et la production s'oriente à présent à la baisse. Certains indicateurs comme ceux relatifs aux importations de nucléi incitent à penser que le recul de la production devrait durer. Selon M. Poirine, la crise de la perliculture polynésienne est un exemple de plus des conséquences dramatiques de l'exploitation inconsidérée de ressources naturelles communes.
M Poirine a présenté des modèles théoriques de production perlicole qui ont mis en évidence le décalage entre les conditions économiques et les facteurs biologiques les plus favorables à la production des perles. Il a notamment souligné qu'au plan économique, les conditions optimales de production sont réunies à des densités de peuplement très largement inférieures à la densité maximale soutenable. Il a également examiné les avantages respectifs des divers cadres réglementaires mis en place pour tenter de résoudre les problèmes liés à la surexploitation et cité les systèmes de quotas en vigueur en Australie et les mécanismes de gestion en coopération des ressources halieutiques instaurés au Japon. L'exposé de Bernard Poirine a été suivi d'un débat auquel ont pris part Terii Seaman et Ben Ponia. En Polynésie française, on a constitué un groupe de travail chargé d'examiner les questions intéressant le contrôle des exportations, les restrictions à l'octroi de concessions perlicoles, l'application de normes minimales de qualité et la réglementation des densités de peuplement d'huîtres.
La culture des huîtres perlières, et en particulier de P. margaritifera, suscite un intérêt grandissant. Dans son intervention, Ajai Sonkar a fait référence au potentiel de développement de la culture de cette espèce dans les îles Andaman et Nicobar. Ces deux archipels, situés dans la zone économique exclusive de l'Inde, abritent plusieurs sites adaptés à la culture de P. margaritifera. Toutefois, les stocks naturels de P. margaritifera sont peu abondants localement et il faudra peut-être envisager de produire des huîtres en écloserie.
Les chercheurs de l'Université James Cook, dans le Queensland (Australie), ont examiné divers aspects de la production d'huîtres afin d'améliorer les techniques utilisées pour la culture de P. margaritifera. Josiah Pit a évalué plusieurs espèces d'algues tropicales pour déterminer dans quelle mesure elles pourraient se substituer aux espèces originaires de régions plus tempérées qui constituent généralement le régime alimentaire de P. margaritifera. Il a notamment constaté que l'introduction de Pavlova salina dans l'alimentation des larves leur était bénéfique. Hector Acosta-Salmon a présenté une technique non destructrice de prélèvement de tissu gonadique chez P. margaritifera qui consiste, après injection de phénoxetol de propylène, substances aux propriétés relaxantes, à insérer dans la coquille de l'huître une aiguille de biopsie munie d'une encoche de 10 mm afin de retirer des gamètes de la surface antéro-dorsale de la gonade. Les échantillons ainsi prélevés servent à l'étude des conditions de reproduction des huîtres.
Culture de Pinctada maxima en Irian Jaya
Dans le passé, les informations sur les travaux de recherche et développement menés sur P. maxima dans les fermes perlicoles étaient rares. L'année 2001 et les prochaines réunions sur l'huître perlière devraient en revanche donner lieu à une avalanche d'informations sur cette question. Joseph Taylor, Jens Knauer et Anne- Michelle Lee, de la société Atlas Pacific Pty Ltd, basée à Perth (Australie occidentale), ont présenté plusieurs exposés et une affiche sur les activités entreprises pour améliorer la qualité des perles des mers du Sud produites en Irian Jaya. Joseph Taylor a indiqué qu'en Australie, des perles de couleur dorée s'étaient récemment vendues à des prix nettement supérieurs à ceux des perles argentées. Les intervenants ont ensuite discuté de l'intérêt des tentatives visant à accroître le pourcentage de perles de cette couleur. Joseph Taylor a précisé que la proportion de perles dorées récoltées en Indonésie est supérieure à celle enregistrée en Australie et qu'après sélection de donneurs de saibo (manteau) doré, on obtenait une augmentation de 8,6 pour cent du nombre de perles dorées. Toutefois, il a émis des réserves sur l'efficacité de cette méthode, la proportion de perles de couleur jaune crème demeurant par ailleurs très élevée (78,8%). À l'inverse, en utilisant du saibo argent nacré, on obtiendrait selon les informations disponibles plus de 98 pour cent de perles blanc argenté, dont un grand nombre dans les catégories des perles rondes, des poires et des boutons, qui sont les plus appréciées.
Dans le passé, la pénurie de donneurs a été l'un des principaux obstacles à l'utilisation de saibo argenté en Indonésie. Jens Knauer a indiqué à ce propos que le pourcentage d'huîtres à nacre argentée est compris dans certains sites entre 0,3% et 8,9% et a passé en revue les diverses stratégies utilisées pour accroître les réserves de donneurs de saibo présentant les caractéristiques requises. Dans un premier temps, on a produit des larves à partir de reproducteurs choisis pour leur nacre argentée, qui ont ensuite été rejoints par des huîtres à nacre argentée sélectionnées après suivi parmi des individus âgés de 20 à 24 mois issus de cycle de production classiques. Il est intéressant de noter à cet égard que Taylor et Knauer ont tous deux relevé des différences de croissance entre les huîtres à nacre argentée et les huîtres à nacre dorée, ces dernières grossissant plus vite.
Taylor et Knauer ont ensuite fait état des activités visant à accroître le rendement des opérations perlicoles. L'objectif est de conditionner les huîtres avant greffage et d'élaborer des méthodes permettant de mieux cerner les facteurs qui doivent entrer dans la sélection des nucléi. On a comparé les conditions opératoires, les taux de survie postopératoire et les taux de rétention des nucléi relevés chez des huîtres placées sur le fond et d'autres suspendues dans des sacs à mailles de 1 mm ou dans des sacs de riz. C'est parmi les huîtres cultivées sur le fond qu'on a enregistré le plus fort pourcentage d'individus opérables. Par contre, les taux de survie et de rétention des nucléi sont plus élevés chez les huîtres suspendues dans des sacs à mailles. En ce qui concerne la sélection des nucléi, Knauer a fait remarquer qu'à des prix compris entre 88 et 165 dollars australiens le kilo, les nucléi constituent un poste de dépenses particulièrement lourd et absorbent des ressources qui pourraient être consacrées au développement des exploitations perlicoles. Dans le passé, les achats de nucléi s'effectuaient sur la base de prévisions empiriques qui se révélaient généralement justes à 60%. Des études sur le lien entre les caractères morphologiques de P. maxima (poids humide, poids de la coquille, largeur et longueur) et la taille des nucléi à implanter ont été entreprises. Selon Knauer, le poids humide des huîtres est le meilleur indicateur de la taille du nucléus à sélectionner. En outre, la prise en compte d'un seul trait morphologique porte bien au-delà des 60 % le degré de précision des prévisions relatives à la taille optimale des nucléi.
Atlas Pacific poursuit son programme d'évaluation des sites perlicoles et des profondeurs de suspension des huîtres afin de recueillir des données sur les taux de croissance des huîtres perlières par classe de taille. Anne-Michelle Lee a effectué le suivi de divers paramètres environnementaux qu'elle a corrélés aux taux de croissance des huîtres. Si la profondeur ne semble pas constituer un facteur de croissance important, on commence à avoir une idée plus précise de l'influence sur la croissance des huîtres des facteurs d'ordre spatial et saisonnier.
Culture des akoyas en Australie
Les succès enregistrés ces 15 dernières années dans le secteur perlicole ont incité de nouveaux candidats à se lancer dans la perliculture. Cette année, plusieurs réunions ont été consacrées aux recherches axées sur la production de perles akoyas dans le Queensland et en Nouvelle-Galles du Sud. Josiah Pit a présenté les résultats de deux programmes de recherche expérimentale sur les taux de croissance de P. imbricata : celui qu'il dirige à la station de recherche de l'Université James Cook sur l'île d'Orpheus et celui que je mène au centre de recherche halieutique du service des pêches de la Nouvelle-Galles du Sud, à Port Stephens. Les taux de croissance des larves relevés sur les deux sites d'étude sont identiques (à environ 20 jours de la fixation), mais la croissance des huîtres en écloserie et en bassins de grossissement est plus rapide dans les eaux plus chaudes du Queensland. Exception faite de ces quelques différences, on peut obtenir en douze mois, dans le Queensland comme en Nouvelle-Galles du Sud, des individus de 50 mm, voire plus.
En dépit des forts taux de croissance relevés dans le Queensland, on a observé la présence d'individus à croissance lente dans les lots de P. imbricata produits. Or, on peut s'interroger sur l'intérêt qu'il y a à poursuivre l'élevage de ces "avortons". En réponse à cette question, Josiah Pit a fait état d'expériences dans lesquelles les avortons ont été séparés de leurs congénères et leurs taux de croissance individuels comparés à ceux des individus de plus grande taille. On a ainsi constaté que les avortons se mettaient alors à grossir dans les mêmes proportions que les autres huîtres, ce qui semble indiquer que les faibles taux de croissance enregistrés lors des tout premiers stades de leur développement étaient dus à des facteurs environnementaux et non génétiques.
Parallèlement aux études que nous menions sur le potentiel de développement de la culture de P. imbricata en Nouvelle-Galles du Sud, nous avons commencé à nous intéresser aux conditions de reproduction de l'espèce. Nos travaux ont montré que l'activité reproductrice de P. imbricata est plus importante de la fin du printemps au début de l'automne et faible durant l'hiver. On distingue deux périodes d'intense activité reproductrice : en novembre et en mars-avril. L'examen des gonades au microscope fait cependant apparaître certaines différences entre ces deux périodes de reproduction. En effet, une grande partie des gonades prélevées en novembre étaient vides, ce qui semble logique compte tenu de la période de ponte, tandis que l'examen des échantillons recueillis en avril-mai tendaient à indiquer que les gonades étaient en phase de résorption. Le nombre de naissains fixés a considérablement varié d'une année à l'autre, mais la fixation des larves s'effectue exclusivement durant les mois d'été (de décembre à février). Ce constat cadre bien avec la ponte du mois de novembre et incite par ailleurs à penser que la période automnale de forte activité reproductrice est sans incidence sur la fixation des huîtres.
Si à ce jour les prédateurs ne constituent pas un problème majeur pour la culture de P. imbricata en Nouvelle- Galles du Sud, la présence du ver plat Imogine mcgrathi, dans des cages et des sacs à naissains est malgré tout préoccupante. Ce ver se nourrit d'huîtres perlières à raison d'un individu par mois environ et infeste en grands nombres, bien que de manière sporadique, d'autres élevages de mollusques de Nouvelle-Galles du Sud, notamment les fermes ostréicoles et mytilicoles. On a donc évalué l'efficacité de différents protocoles de lutte contre ce prédateur pour le cas où il viendrait à coloniser massivement les élevages d'huîtres perlières. Un moyen efficace de lutte contre le ver plat consiste à plonger les huîtres dans du sel ou dans un bain à faible ou à forte concentration de sel. À l'heure actuelle, les huîtres élevées en cage sont plongées dans de l'eau douce pendant 30 minutes, ce qui suffit à tuer les vers. De manière générale, il faut veiller à ce que la salinité de l'eau ne soit pas supérieure à 2,5 ppm.
Mexique : le secteur perlicole en plein développement
Durant les débats, Richard Fassler a exprimé à plusieurs reprises son admiration pour les travaux menés au Mexique dans le domaine perlicole. C'est donc avec grand intérêt que nous avons pris connaissance des informations que Carlos Rangel-Davalos et plusieurs de ses collègues nous ont présentées à ce sujet à l'occasion de la réunion. L'industrie perlière mexicaine repose principalement sur la culture de Pteria sterna et de Pinctada mazatlanica, qui peuvent être produites en écloserie. Carlos Rangel-Davalos a décrit la méthode de culture qu'il a expérimentée dans le cadre de ses recherches. Elle consiste à placer les huîtres dans des cages en plastique à mailles de 3,6 x 3,6 m. Lorsqu'elles atteignent 70 mm, elles peuvent être greffées et sont ensuite placées dans des filets kangourou "repliés", fixés sur un cadre en fer posé sur le fond. L'entretien de ce système suppose la présence de trois techniciens pendant 90 jours pour chaque lot de 10 000 individus. Trois ans s'écoulent entre la formation des naissains et la récolte des perles.
Outre leurs recherches sur la perliculture, Carlos Rangel- Davalos et ses collègues ont également mentionné les activités de repeuplement des bancs d'huîtres naturels avec des juvéniles nés en écloserie. Dans le passé, les bancs d'huîtres du Mexique ont fait l'objet d'une exploitation intensive, au point qu'il a fallu interdire la pêche des huîtres. Les intervenants ont également présenté une affiche sur le repeuplement réussi d'une colonie d'huîtres de l'île de La Gaviota, dans la baie de La Paz. L'utilisation de parcs d'élevage grillagés destinés à protéger les huîtres jusqu'à ce qu'elles atteignent 98 mm est au coeur du succès de ce projet. Au bout de 11 mois, on enregistrait des taux de survie compris entre 8,3 et 21,2%.